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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

ceux qui n’y étoient point admis, et dont on séduisoit les collègues en les y invitant. L’on voyait, les jours de décade, car les dimanches n’existoient plus, tous les élémens de l’ancien et du nouveau régime réunis dans les soirées, mais non réconciliés. Les élégantes manières des personnes bien élevées perçoient à travers l’humble costume qu’elles gardoient encore, comme au temps de la terreur. Les hommes convertis du parti jacobin entroient pour la première fois dans la société du grand monde, et leur amour-propre étoit plus ombrageux encore sur tout ce qui tient au bon ton qu’ils vouloient imiter, que sur aucun autre sujet. Les femmes de l’ancien régime les entouroient pour en obtenir la rentrée de leurs frères, de leurs fils, de leurs époux, et la flatterie gracieuse dont elles savoient se servir venoit frapper ces rudes oreilles, et disposoit les factieux les plus acerbes à ce que nous avons vu depuis ; c’est-à-dire, à refaire une cour, à reprendre tous ses abus, mais en ayant grand soin de se les appliquer à eux-mêmes.

Les apologies de ceux qui avoient pris part à la terreur étoient vraiment la plus incroyable école de sophisme à laquelle on pût assister. Les uns disoient qu’ils avoient été contraints à