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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

CHAPITRE XX.

De l’état des esprits au moment où la république directoriale
s’est établie en France
.

LE règne de la terreur doit être uniquement attribué aux principes de la tyrannie ; on les y retrouve tout entiers. Les formes populaires adoptées par ce gouvernement n’étoient qu’une sorte de cérémonial qui convenoit à ces despotes farouches ; mais les membres du comité de salut public professoient à la tribune même le code du machiavélisme, c’est-à-dire, le pouvoir fondé sur l’avilissement des hommes ; ils avoient seulement soin de traduire en termes nouveaux ces vieilles maximes. La liberté de la presse leur étoit bien plus odieuse encore qu’aux anciens états féodaux ou théocratiques ; ils n’accordoient aucune garantie aux accusés, ni par les lois, ni par les juges. L’arbitraire sans bornes étoit leur doctrine ; il leur suffisoit de donner pour prétexte à toutes les violences le nom propre de leur gouvernement, le salut public : funeste expression, qui renferme le sacrifice de la morale à ce qu’on est convenu