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CONSIDÉRATIONS

M. Turgot et ses amis se brouillèrent à cette occasion avec M. Necker : une émeute, causée par la cherté du pain, eut lieu dans l’année 1775, où M. Necker publia son livre ; et, parce qu’il avoit signalé les fausses mesures qui provoquèrent cette émeute, quelques-uns des économistes les plus exagérés en accusèrent son ouvrage. Mais ce reproche étoit absurde ; car un écrit fondé sur des idées purement générales, ne peut avoir d’influence à son début que sur les classes supérieures.

M. Necker, ayant eu toute sa vie affaire aux choses réelles, savoit se plier aux modifications qu’elles exigent : toutefois il ne rejetoit pas avec dédain les principes, car il n’y a que les gens médiocres qui mettent en opposition la théorie et la pratique. L’une doit être le résultat de l’autre, et elles se confirment toujours mutuellement.

Peu de mois avant d’être nommé ministre, M. Necker fit un voyage en Angleterre. Il rapporta de ce pays une admiration profonde pour la plupart de ses institutions ; mais ce qu’il étudia particulièrement, c’est la grande influence de la publicité sur le crédit, et les moyens immenses que donne une assemblée représentative pour soutenir et pour renouveler les