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CONSIDÉRATIONS

stamment aux honneurs qu’on vouloit rendre à La Fontaine, et ne professa de l’admiration que pour Boileau. La littérature, en l’exaltant avec excès, a bien plus fait pour lui qu’il n’a fait pour elle. Quelques pensions accordées aux gens de lettres n’exerceront jamais beaucoup d’influence sur les vrais talens. Le génie n’en veut qu’à la gloire, et la gloire ne jaillit que de l’opinion publique.

La littérature n’a pas été moins brillante dans le siècle suivant, quoique sa tendance fût plus philosophique ; mais cette tendance même a commencé vers la fin du règne de Louis XIV. Comme il a régné plus de soixante ans, le siècle a pris son nom ; néanmoins les pensées de ce siècle ne relèvent point de lui ; et, si l’on en excepte Bossuet, qui, malheureusement pour nous et pour lui, asservit son génie au despotisme et au fanatisme, presque tous les écrivains du dix-septième siècle firent des pas très-marquans dans la route que les écrivains du dix-huitième ont depuis parcourue. Fénélon, le plus respectable des hommes, sut apprécier, dans un de ses écrits, la constitution anglaise, peu d’années après son établissement ; et, vers la fin du règne de Louis XIV, on vit de toutes parts grandir la raison humaine.