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CONSIDÉRATIONS

dédain de l’espèce humaine inspire à quelques personnes, c’est-à-dire, que les nations ne sont pas faites pour juger de ce qui les intéresse. Les gouvernemens aussi ont souvent donné de terribles preuves d’incapacité, et les freins sont nécessaires à tous les genres d’autorité.

Le parti populaire ne vouloit qu’un veto suspensif, au lieu d’un veto absolu ; c’est-à-dire, que le refus du roi de sanctionner une loi cessât de droit à l’assemblée suivante, si elle insistoit de nouveau sur la même loi. La discussion s’échauffa ; d’une part, l’on soutenoit que le veto absolu du roi empêchoit toute espèce d’amélioration proposée par l’assemblée ; et de l’autre, que le veto suspensif réduiroit le roi tôt ou tard à la nécessité d’obéir en tout aux représentans du peuple. M. Necker, dans un mémoire où il traite avec une rare sagacité toutes les questions constitutionnelles, indiqua, pour terme moyen, trois législatures au lieu de deux, c’est-à-dire, que le veto du roi ne cédât qu’à la proposition réitérée de la troisième assemblée. Voici quels étoient les motifs énoncés par M. Necker à ce sujet.

En Angleterre, disait-il, le roi n’use que très-rarement de son veto, parce que la chambre des pairs lui en épargne presque toujours la