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nistres et à ses amis dans l’assemblée ; mais alors ils n’auroient été que des agens secondaires dans la marche des événemens, et ils vouloient se placer au premier rang : ils prirent donc, très-imprudemment, leur appui au dehors, dans les rassemblemens qui commençoient à préparer un orage souterrain. Ils gagnèrent de l’ascendant dans l’assemblée, en se moquant des modérés, comme si la modération étoit de la faiblesse, et qu’eux seuls fussent des caractères forts ; on les voyait, dans les salles et sur les bancs des députés, tourner en ridicule quiconque s’avisoit de leur représenter qu’avant eux les hommes avoient existé en société, que les écrivains avoient pensé, et que l’Angleterre étoit en possession de quelque liberté. On eût dit qu’on leur répétoit les contes de leur nourrice, tant ils écoutoient avec impatience, tant ils prononçoient avec dédain de certaines phrases bien exagérées et bien décisives sur l’impossibilité d’admettre un sénat héréditaire, un sénat même à vie, un veto absolu, une condition de propriété, enfin tout ce qui, disoient-ils, attentoit à la souveraineté du peuple ! Ils portoient la fatuité des cours dans la cause démocratique, et plusieurs députés du tiers étaient, tout à la fois, éblouis par leurs belles manières de gen-