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la seule en France qui ait véritablement représenté le vœu de la nation ; et c’est à cause de cela que sa force étoit incalculable.

Une autre aristocratie, celle de la capitale, existoit impérieusement. Tout se faisoit à Paris, ou plutôt à Versailles, car le pouvoir étoit concentré tout entier dans les ministres et dans la cour. L’assemblée constituante accomplit facilement le projet que M. Necker avoit en vain tenté, l’établissement des assemblées provinciales. Il y en eut dans chaque département, et des municipalités furent instituées dans chaque ville. Les intérêts locaux furent ainsi soignés par des administrateurs qui y prenoient part, et qui étoient connus des administrés. De toutes parts se répandoient la vie, l’émulation, les lumières ; il y eut une France au lieu d’une capitale, une capitale au lieu d’une cour. Enfin, la voix du peuple, appelée depuis si long-temps la voix de Dieu, fut consultée par le gouvernement ; et elle l’auroit bien dirigé, si, comme nous sommes condamnée à le rappeler, l’assemblée constituante n’avoit pas mis trop de précipitation dans ses réformes dès les premiers jours de sa puissance, et si elle n’étoit pas, bientôt après, tombée dans les mains des factieux qui, n’ayant plus rien à