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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇOISE

tiers état, parce qu’ils étoient censés d’une autre race. L’on ne pouvoit choisir des offlciers que parmi ces privilégiés, excepté dans l’artillerie et le génie, armes pour lesquelles il falloit plus d’instruction que les nobles de province n’en avoient d’ordinaire ; et cependant l’on donnoit des régimens à de jeunes seigneurs incapables de les conduire, parce qu’un gentilhomme ne pouvant faire que le métier des armes, il falloit bien que l’état se chargeât de son existence. De là résulte qu’à la bravoure près, l’armée françoise de l’ancien régime devenoit chaque jour moins respectable aux yeux des étrangers. Quelle émulation et quels talens militaires l’égalité des citoyens n’a-t-elle pas fait naître en France ! C’est ainsi que l’on a dû à l’assemblée constituante cette gloire de nos armes dont nous avons eu raison d’être fiers, tant qu’elle n’est pas devenue la propriété d’un seul homme.

L’autorité suprême du roi lui permettoit de dérober, par des lettres de cachet, un gentilhomme à l’action de la loi, quand il avoit commis un crime. Le comte de Charolois en fut un exemple frappant dans le dernier siècle, et beaucoup d’autres du même genre pourroient être cités. Cependant, par un singulier con-