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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇOISE

nisation, et que le respect des formes y étoit consacré, les ministres des rois ont été sans cesse en guerre avec eux ; et, comme nous l’avons dit plus haut, il n’y a presque pas eu, depuis le commencement de la monarchie françoise, un crime d’état dont la connaissance n’ait été soustraite aux tribunaux ordinaires, ou dans le jugement duquel les formes voulues par la loi aient été suivies. En examinant la liste sans fin des ministres, des nobles et des citoyens condamnés à mort pour des causes politiques, depuis plusieurs siècles, on voit, il faut le dire à l’honneur de la magistrature légale, que le gouvernement a été obligé de renvoyer les procès à des commissions extraordinaires, quand il a voulu s’assurer des sentences. Ces commissions étoient souvent prises, il est vrai, parmi les anciens magistrats, mais non d’après les coutumes établies ; et cependant le gouvernement ne pouvoit que trop se fier en général à l’esprit des tribunaux. La jurisprudence criminelle de France étoit tout entière vengeresse de ce qu’on appeloit l’état, et nullement protectrice des individus. Par une suite des abus aristocratiques qui dévoroient la nation, les procès civils étoient conduits avec beaucoup plus d’équité que les pro-