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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

chez le roi ; mais rien de sérieux ne lui fut jamais communiqué. Ce silence envers le ministre principal étoit bien inquiétant, quand de toutes parts on voyoit arriver des régimens étrangers qui se plaçoient autour de Paris et de Versailles. Mon père nous disoit confidentiellement chaque soir, qu’il s’attendoit à être arrêté le lendemain, mais que le danger auquel le roi s’exposoit étoit si grand à ses yeux, qu’il se faisoit une loi de rester, pour n’avoir pas l’air de soupçonner ce qui se passait.

Le 11 juillet, à trois heures après midi, M. Necker reçut une lettre du roi qui lui ordonnoit de quitter Paris et la France, et lui recommandoit seulement de cacher à tout le monde son départ. Le baron de Breteuil avoit été d’avis, dans le comité, d’arrêter M. Necker, parce que son renvoi devoit causer une émeute. « Je réponds, dit le roi, qu’il obéira strictement au secret que je lui demanderai. » M. Necker fut touché de cette confiance dans sa probité, bien qu’elle fût accompagnée d’un ordre d’exil.

Il sut, depuis, que deux officiers des gardes du corps l’avoient suivi pour s’assurer de sa personne, s’il ne s’étoit pas soumis à l’injonction