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CONSIDÉRATIONS

blesse, qu’il n’était pas même permis d’entrer dans les carrosses du roi sans des preuves vérifiées par le généalogiste de la cour, et qui remontoient au delà de 1400, c’est-à-dire, avant l’époque où les rois ont introduit les anoblissements ; et, d’un autre côté, la plus grande importance attachée à la faculté donnée au roi d’anoblir. Aucune puissance humaine ne peut faire un noble véritable ; ce serait disposer du passé, ce qui paroît impossible à la Divinité même ; mais rien n’était plus facile en France que de devenir un privilégié ; et cependant c’était entrer dans une caste à part, et acquérir, pour ainsi dire, le droit de nuire au reste de la nation, en augmentant le nombre de ceux qui ne supportoient pas les charges de l’état, et qui se croyoient des droits particuliers à ses faveurs. Si la noblesse françoise était restée purement militaire, on aurait pu longtemps encore, par le sentiment de l’admiration et de la reconnaissance, se soumettre aux avantages dont elle jouissait ; mais, depuis un siècle, un tabouret a la cour était demandé avec autant d’instance qu’un régiment à l’armée. Les nobles de France n’étoient ni des magistrats par la pairie, comme en Angleterre, ni des seigneurs suzerains comme en Allemagne. Qu’étaient-ils