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LA PHILOSOPHIE ET LA MORALE

muables de notre manière de raisonner ; donc ces lois aussi sont en nous-mêmes et non au dehors de nous.

On appelle, dans la philosophie allemande, idées subjectives celles qui naissent de la nature de notre intelligence et de ses facultés, et idées objectives toutes celles qui sont excitées par les sensations. Quelle que soit la dénomination qu’on adopte à cet égard, il me semble que l’examen de notre esprit s’accorde avec la pensée dominante de Kant, c’est-à-dire la distinction qu’il établit entre les formes de notre entendement et les objets que nous connoissons d’après ces formes ; et soit qu’il s’en tienne aux conceptions abstraites, soit qu’il en appelle, dans la religion et dans la morale, aux sentiments qu’il considère aussi comme indépendants de l’expérience, rien n’est plus lumineux que la ligne de démarcation qu’il trace entre ce qui nous vient par les sensations et ce qui tient à l’action spontanée de notre âme.

Quelques mots de la doctrine de Kant ayant été mal interprétés, on a prétendu qu’il croyoit aux connoissances à priori, c’est-à-dire à celles qui seroient gravées dans notre esprit avant que nous les eussions apprises. D’autres philosophes