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KANT.

la nature du beau pour objet ; la même théorie sert de base à ces trois traités, qui embrassent les lois de l’intelligence, les principes de la vertu et la contemplation des beautés de la nature et des arts.

Je vais tâcher de donner un aperçu des idées principales que renferme cette doctrine. Quelque soin que je prenne pour l’exposer avec clarté, je ne me dissimule point qu’il faudra toujours de l’attention pour la comprendre. Un prince qui apprenoit les mathématiques s’impatientoit du travail qu’exigeoit cette étude : — Il faut nécessairement, lui dit celui qui les enseignoit, que votre altesse se donne la peine d’étudier pour savoir ; car il n’y a point de route royale en mathématiques. — Le public français, qui a tant de raisons de se croire un prince, permettra bien qu’on lui dise qu’il n’y a point de route royale en métaphysique, et que, pour arriver à la conception d’une théorie quelconque, il faut passer par les intermédiaires qui ont conduit l’auteur lui-même aux résultats qu’il présente.

La philosophie matérialiste livroit l’entendement humain à l’empire des objets extérieurs, la morale à l’intérêt personnel, et réduisoit le beau à n’être que l’agréable. Kant voulut rétablir les