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SUR LA PHILOSOPHIE ALLEMANDE

terrestres est peut-être la vérité suprême sous des rapports universels.

Le Dante a exprimé une grande pensée philosophique par ce vers :

A guisa del ver primo che l’uom crede[1].


Il faut croire à de certaines vérités comme à l’existence ; c’est l’âme qui nous les révèle, et les raisonnements de tout genre ne sont jamais que de foibles dérivés de cette source.

La Théodicée de Leibnitz traite de la prescience divine et de la cause du bien et du mal : c’est un des ouvrages les plus profonds et les mieux raisonnés sur la théorie de l’infini ; toutefois l’auteur applique trop souvent à ce qui est sans bornes une logique dont les objets circonscrits sont seuls susceptibles. Leibnitz étoit un homme très-religieux ; mais par cela même il se croyoit obligé de fonder les vérités de la foi sur des raisonnements mathématiques, afin de les appuyer sur les bases qui sont admises dans l’empire de l’expérience : cette erreur tient à un respect qu’on ne s’avoue pas pour les esprits froids et arides : on veut les convaincre à leur manière ;

  1. C’est ainsi que l’homme croit à la vérité primitive.