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SUR LA PHILOSOPHIE ALLEMANDE

mains, et qu’ils se sont pourtant livrés plus qu’aucun autre peuple à la philosophie spéculative ; mais ne peut-on pas attribuer aux Indiens quelques-uns des systèmes intellectuels développés chez les Grecs ? La philosophie idéaliste de Pythagore et de Platon ne s’accorde guère avec le paganisme tel que nous le connoissons, aussi les traditions historiques portent-elles à croire que c’est à travers l’Égypte que les peuples du midi de l’Europe ont reçu l’influence de l’Orient. La philosophie d’Épicure est la seule vraiment originaire de la Grèce.

Quoi qu’il en soit de ces conjectures, il est certain que la spiritualité de l’âme et toutes les pensées qui en dérivent ont été facilement naturalisées chez les nations du Nord, et que parmi ces nations les Allemands se sont toujours montrés plus enclins qu’aucun autre peuple à la philosophie contemplative. Leur Bacon et leur Descartes, c’est Leibnitz. On trouve dans ce beau génie toutes les qualités dont les philosophes allemands en général se font gloire d’approcher : érudition immense, bonne foi parfaite, enthousiasme caché sous des formes sévères. Il avoit profondément étudié la théologie, la jurisprudence, l’histoire, les langues, les mathématiques,