Page:De Staël – De l’Allemagne, Tome 3, 1814.djvu/409

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
276
DE L’INFLUENCE DE L’ENTHOUSIASME.

nous excite à nous en occuper avec ardeur. En considérant d’ailleurs la destinée humaine en général, je crois qu’on peut affirmer que nous ne rencontrerons jamais le vrai que par l’élévation de l’âme ; tout ce qui tend à nous rabaisser est mensonge, et c’est, quoi qu’on en dise, du côté des sentiments vulgaires qu’est l’erreur.

L’enthousiasme, je le répète, ne ressemble en rien au fanatisme, et ne peut égarer comme lui. L’enthousiasme est tolérant, non par indifférence, mais parce qu’il nous fait sentir l’intérêt et la beauté de toutes choses. La raison ne donne point de bonheur à la place de ce qu’elle ôte, l’enthousiasme trouve dans la rêverie du cœur et dans l’étendue de la pensée ce que le fanatisme et la passion renferment dans une seule idée ou dans un seul objet. Ce sentiment est par son universalité même très-favorable à la pensée et à l’imagination.

La société développe l’esprit, mais c’est la contemplation seule qui forme le génie. L’amour-propre est le mobile des pays où la société domine, et l’amour-propre conduit nécessairement à la moquerie qui détruit tout enthousiasme.

Il est assez amusant, on ne sauroit le nier,