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DE L’ESPRIT DE SECTE

établies par la société ; car si, sous quelques rapports, l’état social forme un lien entre les hommes en les soumettant à l’empire des lois, il les sépare par les différences de rang et de gouvernement : cette fraternité, véritable image de l’âge d’or, a été mêlée dans la franc-maçonnerie à beaucoup d’autres idées qui sont aussi bonnes et morales. On ne sauroit se dissimuler cependant qu’il est dans la nature des associations secrètes de porter les esprits vers l’indépendance ; mais ces associations sont très-favorables au développement des lumières, car tout ce que les hommes font par eux-mêmes et spontanément donne à leur jugement plus de force et d’étendue.

Il se peut aussi que les principes de l’égalité démocratique se propagent par ce genre d’institutions qui met les hommes en évidence d’après leur valeur réelle et non d’après leur rang dans le monde. Les associations secrètes apprennent quelle est la puissance du nombre et de la réunion, tandis que les citoyens isolés sont pour ainsi dire des êtres abstraits les uns pour les autres. Sous ce rapport, ces associations pourroient avoir une grande influence dans l’état ; mais il est juste cependant de reconnoître que la franc-maçonnerie ne s’occupe en général que des intérêts religieux et philosophiques.