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DE LA PHILOSOPHIE ANGLAISE.

admis le système, l’ont appliqué d’une manière beaucoup plus logique.

La métaphysique de Locke n’a eu d’autre effet sur les esprits en Angleterre que de ternir un peu leur originalité naturelle ; quand même elle dessécheroit la source des grandes pensées philosophiques, elle ne sauroit détruire le sentiment religieux qui sait si bien y suppléer ; mais cette métaphysique reçue dans le reste de l’Europe, l’Allemagne exceptée, a été l’une des principales causes de l’immoralité dont on s’est fait une théorie, pour en mieux assurer la pratique.

Locke s’est particulièrement attaché à prouver qu’il iîy avoit rien d’inné dans l’âme : il avoit raison, puisqu’il mêloit toujours au sens du mot idée un développement acquis par l’expérience ; les idées ainsi conçues sont le résultat des objets qui les excitent, des comparaisons qui les rassemblent, et du langage qui en facilite la combinaison. Mais il n’en est pas de même des sentiments, ni des dispositions, ni des facultés qui constituent les lois de l’entendement humain, comme l’attraction et l’impulsion constituent celles de la nature physique.

Une chose vraiment digne de remarque, ce sont les arguments dont Locke a été obligé de se servir