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DE LA PHILOSOPHIE ANGLAISE.

mais c’est un mauvais instrument pour apprendre à connoître ce qui est vivant ; et si l’on a de la peine à définir par des paroles la conception animée qui nous représente les objets tout entiers, c’est précisément parce que cette conception tient de plus près à l’essence des choses. Diviser pour comprendre est en philosophie un signe de foiblesse, comme en politique diviser pour régner.

Bacon tenoit encore beaucoup plus qu’on ne croit à cette philosophie idéaliste qui depuis Platon jusqu’à nos jours a constamment reparu sous diverses formes ; néanmoins le succès de sa méthode analytique dans les sciences exactes a nécessairement influé sur son système en métaphysique : l’on a compris d’une manière beaucoup plus absolue qu’il ne l’avoit présentée lui-même, sa doctrine sur les sensations considérées comme l’origine des idées. Nous pouvons voir clairement l’influence de cette doctrine par les deux écoles qu’elle a produites, celle de Hobbes et celle de Locke. Certainement l’une et l’autre diffèrent beaucoup dans le but ; mais leurs principes sont semblables à plusieurs égards.

Hobbes prit à la lettre la philosophie qui fait dériver toutes nos idées des impressions des sens :