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DU CATHOLICISME.

On a prétendu que c’étoit une sorte de frivolité, dans les écrivains allemands, de présenter comme l’un des mérites de la religion chrétienne l’influence favorable qu’elle exercoit sur les arts, l’imagination et la poésie ; et le même reproche a été fait à cet égard au bel ouvrage de M. de Châteaubriant, sur le Génie du Christianisme. Les esprits vraiment frivoles ce sont ceux qui prennent des vues courtes pour des vues profondes, et se persuadent qu’on peut procéder avec la nature humaine par voie d’exclusion, et supprimer la plupart des désirs et des besoins de l’âme. C’est une des grandes preuves de la divinité de la religion chrétienne que son analogie parfaite avec toutes nos facultés morales ; seulement il ne me paroît pas qu’on puisse considérer la poésie du christianisme sous le même aspect que la poésie du paganisme.

Comme tout étoit extérieur dans le culte païen, la pompe des images y est prodiguée ; le sanctuaire du christianisme étant au fond du cœur, la poésie qu’il inspire doit toujours naître de l’attendrissement. Ce n’est pas la splendeur du ciel chrétien qu’on peut opposer à l’Olympe, mais la douleur et l’innocence, la vieillesse et la mort qui prennent un caractère d’élévation et de