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LA RELIGION ET L’ENTHOUSIASME.

les quakers. Une industrie mercantile les occupe presque tous ; mais on n’entend pas le moindre bruit dans le village. Chacun travaille avec régularité et tranquillité ; et l’action intérieure des sentiments religieux apaise tout autre mouvement.

Les filles et les veuves habitent ensemble dans un grand dortoir, et pendant la nuit une d’elles veille tour à tour pour prier ou pour soigner celles qui pourraient devenir malades. Les hommes non mariés vivent de la même manière. Ainsi il existe une grande famille pour celui qui n’a pas la sienne, et le nom de frère et de sœur est commun à tous les chrétiens.

À la place de cloches, des instruments à vent d’une très-belle harmonie invitent au service divin. En marchant pour aller à l’église au son de cette musique imposante, on se sentoit enlevé à la terre ; on croyoit entendre les trompettes du jugement dernier, non telles que le remords nous les fait craindre, mais telles qu’une pieuse confiance nous les fait espérer ; il sembloit que la miséricorde divine se manifestoit dans cet appel, et prononçoit d’avance un pardon régénérateur.

L’église étoit décorée de roses blanches et de