Page:De Staël – De l’Allemagne, Tome 3, 1814.djvu/31

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
13
DE LA PHILOSOPHIE ANGLAISE.

l’expérience bien au-delà de son intention. Il est loin, je le répète, d’attribuer toutes nos idées à nos sensations, et de considérer l’analyse comme le seul instrument des découvertes. Il suit souvent une marche plus hardie, et s’il sen tient à la logique expérimentale pour écarter tous les préjugés qui encombrent sa route, c’est à l’élan seul du génie qu’il se fie pour marcher en avant.

« L’esprit humain, dit Luther, est comme un paysan ivre à cheval, quand on le relève d’un côté il retombe de l’autre. » Ainsi l’homme a flotté sans cesse entre ses deux natures ; tantôt ses pensées le dégageoient de ses sensations, tantôt ses sensations absorboient ses pensées, et successivement il vouloit tout rapporter aux unes ou aux autres : il me semble néanmoins que le moment d’une doctrine stable est arrivé : la métaphysique doit subir une révolution semblable à celle qu’a faite Copernic dans le système du monde ; elle doit replacer notre âme au centre et la rendre en tout semblable au soleil autour duquel les objets extérieurs tracent leur cercle et dont ils empruntent la lumière.

L’arbre généalogique des connoissances hu-