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DU PROTESTANTISME.

et qui, considérant l’une et l’autre simplement comme de bons écrits d’une lecture instructive, ne voyoient dans les mystères que des métaphores orientales.

Ces théologiens s’appeloient raisonnables, parce qu’ils croyoient dissiper tous les genres d obscurités ; mais c’étoit mal diriger l’esprit d’examen que de vouloir l’appliquer aux vérités qu’on ne peut pressentir que par l élévation et le recueillement de l’âme. L’esprit d’examen doit servir à reconnoître ce qui est supérieur à la raison, comme un astronome marque les hauteurs auxquelles la vue de l’homme n’atteint pas : ainsi donc signaler les régions incompréhensibles, sans prétendre ni les nier, ni les soumettre au langage, c’est se servir de l’esprit d’examen selon sa mesure et selon son but.

L’interprétation savante ne satisfait pas plus que l’autorité dogmatique. L’imagination et la sensibilité des Allemands ne pouvoient se contenter de cette sorte de religion prosaïque qui accordoit un respect de raison au christianisme. Herder le premier fit renaître la foi par la poésie : profondément instruit dans les langues orientales, il avoit pour la Bible un genre d’admiration semblable à celui qu’un Homère sanctifié pourrait