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DE L’AMOUR DANS LE MARIAGE.

convénient ne peut résulter pour lui de ses fautes ; mais il craint le mal qu’il peut faire à celle qui s’est confiée à son cœur, et la générosité l’enchaine d’autant plus que la société le dégage.

La fidélité est commandée aux femmes par mille considérations diverses ; elles peuvent redouter les périls et les humiliations, suites inévitables d’une erreur ; la voix de la conscience est la seule qui se fasse entendre à l’homme ; il sait qu’il fait souffrir, il sait qu’il flétrit par l’inconstance un sentiment qui doit se prolonger jusqu’à la mort et se renouveler dans le ciel : seul avec lui-même, seul au milieu des séductions de tous les genres, il reste pur comme un ange ; car, si les anges n’ont pas été représentés sous des traits de femme, c’est parce que l’union de la force avec la pureté est plus belle et plus céleste encore que la modestie même la plus parfaite dans un être foible.

L’imagination, quand elle n’a pas le souvenir pour frein, détache de ce qu’on possède, embellit ce qu’on craint de ne pas obtenir, et fait du sentiment une difficulté vaincue. Mais de même que dans les arts les difficultés vaincues n’exigent point de vrai génie, dans le sentiment