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DE LA PHILOSOPHIE.

néanmoins il faut s’en détourner, car l’esprit se fatigue en vain dans ces efforts pour escalader le ciel.

L’origine de la pensée a occupé tous les véritables philosophes. Y a-t-il deux natures dans l’homme ? S’il n’y en a qu’une, est-ce l’âme ou la matière ? S’il y en a deux, les idées viennent-elles par les sens, ou naissent-elles dans notre âme, ou bien sont-elles un mélange de l’action des objets extérieurs sur nous et des facultés intérieures que nous possédons ?

À ces trois questions, qui ont divisé de tout temps le monde philosophique, est attaché l’examen qui touche le plus immédiatement à la vertu : savoir, si la fatalité ou le libre arbitre décide des résolutions des hommes.

Chez les anciens, la fatalité venoit de la volonté des dieux ; chez les modernes, on l’attribue au cours des choses. La fatalité, chez les anciens, faisoit ressortir le libre arbitre ; car la volonté de l’homme luttoit contre l’événement, et la résistance morale étoit invincible ; le fatalisme des modernes au contraire, détruit nécessairement la croyance au libre arbitre : si les circonstances nous créent ce que nous sommes, nous ne pouvons pas nous opposer à leur ascendant ; si les