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LA PHILOSOPHIE ET LA MORALE.

servent également, et cette œuvre dépend en entier de nous, quelle que soit notre situation sur la terre.

La morale de Kant et de Fichte est très-analogue à celle des stoïciens ; cependant les stoïciens accordoient davantage à l’empire des qualités naturelles ; l’orgueil romain se retrouve dans leur manière de juger l’homme. Les Kantiens croient à l’action nécessaire et continuelle de la volonté contre les mauvais penchants. Ils ne tolèrent point les exceptions dans l’obéissance au devoir et rejettent toutes les excuses qui pourroient les motiver.

L’opinion de Kant sur la véracité en est un exemple, il la considère avec raison comme la base de toute morale. Quand le fils de Dieu s’est appelé le Verbe ou la parole, peut-être vouloit-il honorer ainsi dans le langage l’admirable faculté de révéler ce qu’on pense. Kant a porté le respect pour la vérité jusqu’au point de ne pas permettre qu’on la trahît, lors même qu’un scélérat viendroit vous demander si votre ami qu’il poursuit est caché dans votre maison. Il prétend qu’il ne faut jamais se permettre dans aucune circonstance particulière ce qui ne sauroit être admis comme loi générale ; mais dans cette oc-