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LA PHILOSOPHIE ET LA MORALE.

tion d’une toute autre nature, celle d’obéir la l’autorité, mais de se tenir éloigné des affaires de l’état, quand elles peuvent compromettre la conscience. La différence qui existe entre les gouvernements anciens et les gouvernements modernes explique cette opposition dans la manière de considérer les relations des hommes envers leur patrie.

La science politique des anciens étoit intimement unie avec la religion et la morale, l’état social étoit un corps plein de vie. Chaque individu se considéroit comme l’un de ses membres. La petitesse des états, le nombre des esclaves qui resserroit encore de beaucoup celui des citoyens, tout faisoit un devoir d’agir pour une patrie qui avoit besoin de chacun de ses fils. Les magistrats, les guerriers, les artistes, les philosophes et presque les Dieux se mêloient sur la place publique, et les mêmes hommes tour à tour gagnoient une bataille, exposoient un chef-d’œuvre, donnoient des lois à leurs pays, ou cherchoient à découvrir celles de l’univers.

Si l’on en excepte le très-petit nombre des gouvernements libres, la grandeur des états chez les modernes et la concentration du pouvoir des