Page:De Staël – De l’Allemagne, Tome 3, 1814.djvu/20

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
2
LA PHILOSOPHIE ET LA MORALE.

heureuses ; mais, malgré les injures et les louanges accidentelles des individus et des nations, la philosophie, la liberté, la religion ne changent jamais de valeur. L’homme a maudit le soleil, l’amour et la vie ; il a souffert, il s’est senti consumé par ces flambeaux de la nature ; mais voudroit-il pour cela les éteindre ?

Tout ce qui tend à comprimer nos facultés est toujours une doctrine avilissante ; il faut les diriger vers le but sublime de l’existence, le perfectionnement moral ; mais ce n’est point par le suicide partiel de telle ou telle puissance de notre être que nous nous rendrons capables de nous élever vers ce but : nous navons pas trop de tous nos moyens pour nous en rapprocher ; et si le ciel avoit accordé à l’homme plus de génie, il en auroit d’autant plus de vertu.

Parmi les différentes branches de la philosophie, celle qui a particulièrement occupé les Allemands, c’est la métaphysique. Les objets qu’elle embrasse peuvent être divisés en trois classes. La première se rapporte au mystère de la création, c’est-à-dire à l’infini en toutes choses ; la seconde, à la formation des idées dans l’esprit humain, et la troisième à l’exercice de nos facultés, sans remonter à leur source.