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LA PHIOLOSOPHIE ET LA MORALE

ses disciples, Wolf à leur tête, les commentèrent avec des formes logiques et métaphysiques. Leibnitz avoit dit que les notions qui nous viennent par les sens sont confuses, et que celles qui appartiennent aux perceptions immédiates de l’âme sont les seules claires : sans doute il vouloit indiquer par-là que les vérités invisibles sont plus certaines et plus en harmonie avec notre être moral que tout ce que nous apprenons par le témoignage des sens. Wolf et ses disciples en tirèrent pour conséquence qu’il falloit réduire en idées abstraites tout ce qui peut occuper notre esprit. Kant reporta l’intérêt et la chaleur dans cet idéalisme sans vie ; il fit à l’expérience une juste part comme aux facultés innées, et l’art avec lequel il appliqua sa théorie à tout ce qui intéresse les hommes, à la morale, à la poésie et aux beaux-arts, en étendit l’influence.

Trois hommes principaux, Lessing, Hemsterhuis et Jacobi précédèrent Kant dans la carrière philosophique. Ils n’avoient point une école, puisqu’ils ne fondoient pas un système ; mais ils commencèrent l’attaque contre la doctrine des matérialistes. Lessing est celui des trois dont les opinions à cet égard étoient les moins décidées ; toutefois il avoit trop d’étendue dans l’esprit pour