Page:De Staël – De l’Allemagne, Tome 2, 1814.djvu/94

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
76
LA LITTÉRATURE ET LES ARTS

apporte une coupe de vin que Marie a demandé pour marcher d’un pas plus ferme à l’échafaud. Une autre arrive chancelante sur la scène, parce qu’à travers la porte de la salle où l’exécution doit avoir lieu, elle a vu les murs tendus de noir, l’échafaud, le bloc et la hache. L’effroi toujours croissant du spectateur est déjà presqu’à son comble, quand Marie paroît dans toute la magnificence d’une parure royale, seule vêtue de blanc au milieu de sa suite en deuil, un crucifix à la main, la couronne sur sa tête, et déjà rayonnante du pardon céleste que ses malheurs ont obtenu pour elle.

Marie console ses femmes dont les sanglots l’émeuvent vivement : « Pourquoi, leur dit-elle, vous affligez-vous de ce que mon cachot s’est ouvert ? La mort, ce sévère ami, vient à moi et couvre de ses ailes noires les fautes de ma vie : le dernier arrêt du sort relève la créature accablée ; je sens de nouveau le diadème sur mon front. Un juste orgueil est rentré dans mon âme purifiée. »

Marie aperçoit Melvil, et se réjouit de le voir dans ce moment solennel ; elle l’interroge sur ses parents de France, sur ses anciens serviteurs, et