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LA LITTÉRATURE ET LES ARTS

Leicester est très-compromis par les amis de la reine d’Écosse ; ils viennent lui demander de les aider à la sauver. Il découvre qu’il est accusé auprès d’Élizabeth, et prend tout à coup l’affreux parti d’abandonner Marie, et de révéler à la reine d’Angleterre avec hardiesse et ruse une partie des secrets qu’il doit à la confiance de sa malheureuse amie. Malgré tous ces lâches sacrifices, il ne rassure Élizabeth qu’à demi, et elle exige qu’il conduise lui-même Marie à l’échafaud, pour prouver qu’il ne l’aime pas. La jalousie de femme se manifestant par le supplice qu’Élizabeth ordonne comme monarque doit inspirer à Leicester une profonde haine pour elle : la reine le fait trembler, quand par les lois de la nature il devroit être son maître ; et ce contraste singulier produit une situation très-originale : mais rien n’égale le cinquième acte. C’est à Weimar que j’assistai à la représentation de Marie Stuart, et je ne puis penser encore sans un profond attendrissement à l’effet des dernières scènes.

On voit d’abord paroître les femmes de Marie vêtues de noir, et dans une morne douleur ; sa vieille nourrice, la plus affligée de toutes, porte ses diamants royaux ; elle lui a ordonné de les