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DE LA LITTÉRARURE ET LES ARTS

phie, s’est voué moins exclusivement que son frère à la littérature ; cependant le morceau qu’il a écrit sur la culture intellectuelle des Grecs et des Romains rassemble en un court espace des aperçus et des résultats du premier ordre. Frédéric Schlegel est l’un des hommes célèbres de l’Allemagne dont l’esprit a le plus d’originalité, et loin de se fier à cette originalité qui lui promettait tant de succès, il a voulu l’appuyer sur des études immenses : c’est une grande preuve de respect pour l’espèce humaine que de ne jamais lui parler d’après soi seul, et sans s’être informé consciencieusement de tout ce que nos prédécesseurs nous ont laissé pour héritage. Les Allemands, dans les richesses de l’esprit humain, sont de véritables propriétaires : ceux qui s’en tiennent à leurs lumières naturelles ne sont que des prolétaires en comparaison d’eux.

Après avoir rendu justice aux rares talents des deux Schlegel, il faut examiner pourtant en quoi consiste la partialité qu’on leur reproche, et dont il est vrai que plusieurs de leurs écrits ne sont pas exempts ; ils penchent visiblement pour le moyen âge, et pour les opinions de cette époque ; la chevalerie sans taches, la foi sans bornes, et la poésie sans réflexions leur parois-