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DE LA COMÉDIE

Parmi les écrivains de la nouvelle école, Tieck est celui qui a le plus le sentiment de la plaisanterie ; ce n’est pas qu’il ait fait aucune comédie qui puisse se jouer, et que celles qu’il a écrites soient bien ordonnées, mais on y voit des traces brillantes d’une gaieté très-originale. D’abord il saisit d’une façon qui rappelle La Fontaine les plaisanteries auxquelles les animaux peuvent donner lieu. Il a fait une comédie intitulée le Chat botté, qui est admirable en ce genre. Je ne sais quel effet produiraient sur la scène des animaux parlants, peut-être est-il plus amusant de se les figurer que de les voir ; mais toutefois ces animaux personnifiés, et agissant à la manière des hommes, semblent la vraie comédie donnée par la nature. Tous les rôles comiques, c’est-à-dire égoïstes et sensuels, tiennent toujours en quelque chose de l’animal. Peu importe donc si dans la comédie c’est l’animal qui imite l’homme, ou l’homme qui imite l’animal.

Tieck intéresse aussi par la direction qu’il sait donner à son talent de moquerie : il le tourne tout entier contre l’esprit calculateur et prosaïque ; et comme la plupart des plaisanteries de société ont pour but de jeter du ridicule sur l’enthousiasme, on aime l’auteur qui ose prendre