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LA LITTÉRATURE ET LES ARTS

personnages refroidit l’intérêt dramatique qu’ils pourraient inspirer. Cet intérêt néanmoins se relève admirablement dans plusieurs scènes de la pièce, mais surtout lorsque Attila, après avoir défait les troupes de l’empereur Valentinien, marche à Rome, et rencontre sur la route le pape Léon, porté sur un brancard, et précédé de la pompe sacerdotale.

Léon le somme, au nom de Dieu, de ne pas entrer dans la ville éternelle. Attila ressent tout à coup une terreur religieuse jusqu’alors étrangère à son âme. Il croit voir dans le ciel saint Pierre qui, l’épée nue, lui défend d’avancer. Cette scène est le sujet d’un admirable tableau de Raphaël. D’un côté, le plus grand calme règne sur la figure du vieillard sans défense, entouré par d’autres vieillards qui se confient, Comme lui, à la protection de Dieu ; et de l’autre, l’effroi se peint sur la redoutable figure du roi des Huns ; son cheval même se cabre à l’éclat de la lumière céleste, et les guerriers de l’invincible baissent les yeux devant les cheveux blancs du saint homme, qui passe sans crainte au milieu d’eux.

Les paroles du poëte expriment très-bien la sublime intention du peintre, le discours de