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FAUST

semble se montrer au jour ; et ce qu’elle veut cacher, tous les efforts de la science ne l’arracheront jamais de son sein.

C’est donc vers toi que mes regards sont attirés, liqueur empoisonnée ! Toi qui donnes la mort, je te salue comme une pâle lueur dans la forêt sombre. En toi j’honore la science et l’esprit de l’homme. Tu es la plus douce essence des sucs qui procurent le sommeil. Tu contiens toutes les forces qui tuent. Viens à mon secours. Je sens déjà l’agitation de mon esprit qui se calme ; je vais m’élancer dans la haute mer. Les flots limpides brillent comme un miroir à mes pieds. Un nouveau jour m’appelle vers l’autre bord. Un char de feu plane déjà sur ma tête ; j’y vais monter ; je saurai parcourir les sphères éthérées, et goûter les délices des cieux.

Mais dans mon abaissement comment les mériter ? Oui, je le puis, si je l’ose, si j’enfonce avec courage ces portes de la mort devant lesquelles chacun passe en frémissant. Il est temps de montrer la dignité de l’homme. Il ne faut plus qu’il tremble au bord de cet abîme, où son imagination se condamne elle-même à ses propres tourments, et dont les