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LA LITTÉRATURE ET LES ARTS

ne pouvoit entrer dans un sujet traité d’une manière aussi simple. Thoas aime Iphigénie ; il ne peut se résoudre à s’en séparer en la laissant retourner en Grèce avec son frère Oreste. Iphigénie pourroit partir à l’insçu de Thoas. Elle débat avec son frère, et avec elle-même, si elle doit se permettre un tel mensonge, et c’est là tout le nœud de la dernière moitié de la pièce. Enfin Iphigénie avoue tout à Thoas, combat sa résistance, et obtient de lui le mot adieu, sur lequel la toile tombe.

Certainement ce sujet ainsi conçu est pur et noble, et il seroit bien à souhaiter qu’on put émouvoir les spectateurs, seulement par un scrupule de délicatesse ; mais ce n’est peut-être pas assez pour le théâtre, et l’on s’intéresse plus à cette pièce quand on la lit que quand on la voit représenter. C’est l’admiration, et non le pathétique qui est le ressort d’une telle tragédie ; on croit entendre en l’écoutant un chant d’un poëme épique, et le calme qui règne dans tout l’ensernble gagne presque Oreste lui-même. La reconnoissance d’Iphigénie et d’Oreste n’est pas la plus animée, mais peut-être la plus poétique qu’il y ait. Les souvenirs de la famille d’Agamemnon y sont rappelés avec un art admirable, et l’on croit