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COMTE D’EGMONT

et le rayon qui partoit de son regard coloroit d’espérance et de joie vos visages abattus. Quelques-uns d’entre vous portoient leurs enfants sur le seuil de la porte, et les élevant dans leurs bras s’écrioient : — Voyez, c’est le grand Egmont, c’est lui ; lui qui vous vaudra des temps plus heureux que ceux qu’ont supportés vos pauvres pères. — Vos enfants vous demanderont ce que sont devenus ces temps que vous leur avez promis ? Eh quoi ! nous perdons nos moments en paroles, vous êtes oisifs vous le trahissez ! » — Brackenbourg, l’ami de Clara, la conjure de s’en aller. — « Que dira votre mère, s’écrie-t-il ?

CLARA.

Penses-tu que je sois un enfant ou une insensée ? Non, il faut qu’ils m’entendent ; écoutez-moi, citoyens : Je vois que vous êtes troublés, et que vous ne pouvez vous-mêmes vous reconnoître à travers les dangers qui vous menacent, laissez-moi porter vos regards sur le passé, hélas ! le passé d’hier. Songez à l’avenir ; pouvez-vous vivre, vous laissera-t-on vivre s’il périt ? C’est avec lui que s’éteint le dernier souffle de votre liberté. Que n’étoit-il pas pour vous ! Pour qui s’est-il donc exposé à