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JEANNE D’ARC

même chose que les Frères ennemis. Seulement Schiller a introduit de plus une sœur dont les deux frères deviennent amoureux sans savoir qu’elle est leur sœur, et l’un tue l’autre par jalousie. Cette situation, terrible en elle-même, est entremêlée de chœurs qui font partie de la pièce. Ce sont les serviteurs des deux frères qui interrompent et glacent l’intérêt par leurs discussions mutuelles. La poésie lyrique qu’ils récitent tous à la fois est superbe ; mais ils n’en sont pas moins, quoi qu’ils disent, des chœurs de chambellans. Le peuple entier peut seul avoir cette dignité indépendante qui lui permet d’être un spectateur impartial. Le chœur doit représenter la postérité. Si des affections personnelles l’animoient, il seroit nécessairement ridicule ; car on ne concevroit pas comment plusieurs personnes diroient la même chose en même temps, si leurs voix n’étoient pas censées être l’interprète impassible des vérités éternelles.

Schiller, dans la préface qui précède la Fiancée de Messine, se plaint avec raison de ce que nos usages modernes n’ont plus ces formes populaires qui les rendaient si poétiques chez, les anciens.

« Les palais, dit-il, sont fermés, les tribu-