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LA LITTÉRATURE ET LES ARTS

menacoit, elle rendit constamment témoignage devant les Anglais à l’énergie des Français, aux vertus du roi de France, qui cependant l’avoit abandonnée. Sa mort n’est ni celle d’un guerrier ni celle d’un martyr ; mais, à travers la douceur et la timidité de son sexe, elle montra dans les derniers moments une force d’inspiration presque aussi étonnante que celle dont on l’accusoit comme d’une sorcellerie. Quoi qu’il en soit, le simple récit de sa fin émeut bien plus que le dénouement de Schiller. Lorsque la poésie veut ajouter à l’éclat d’un personnage historique, il faut du moins qu’elle lui conserve avec soin la physionomie qui la caractérise car la grandeur n est vraiment frappante que quand on sait lui donner l’air naturel. Or, dans le sujet de Jeanne d’Arc, c’est le fait véritable qui non-seulement a plus de naturel, mais plus de grandeur que la fiction.

La Fiancée de Messine a été composée d’après un système dramatique tout-à-fait différent de celui que Schiller avoit suivi jusqu’alors, et auquel il est heureusement revenu. C’est pour faire admettre les chœurs sur la scène qu’il a choisi un sujet dans lequel il n’y a de nouveau que les noms ; car c’est, au fond, la