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DES MŒURS DES ALLEMANDS

arrivés par correspondance ; mais les institutions féodales, les vieilles coutumes des Germains y sont toujours en honneur, quoique, malheureusement pour la puissance militaire du pays, elles n’y aient plus la même force.

Il n’est point d’assemblage plus bizarre que l’aspect guerrier de l’Allemagne entière, les soldats que l’on rencontre à chaque pas, et le genre de vie casanier qu’on y mène. On y craint les fatigues et les intempéries de l’air, comme si la nation n’étoit composée que de négociants et d’hommes de lettres ; et toutes les institutions cependant tendent et doivent tendre à donner à la nation des habitudes militaires. Quand les peuples du nord bravent les inconvénients de leur climat, ils s’endurcissent singulièrement contre tous les genres de maux : le soldat russe en est la preuve. Mais quand le climat n’est qu’à demi rigoureux, et qu’il est encore possible d’échapper aux injures du ciel par des précautions domestiques, ces précautions mêmes rendent les hommes plus sensibles aux souffrances physiques de la guerre.

Les poêles, la bière et la fumée de tabac forment autour des gens du peuple en Allemagne une sorte d’atmosphère lourde et chaude dont ils