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du philosophe essayerait en vain de pénétrer. L’usage immodéré de liqueurs enivrantes, le changement de climat et de nourriture, les vices, les maladies funestes, tous ces maux que le contact avec les blancs a produits parmi les sauvages ; l’imprévoyance et le manque d’industrie, tout cela ne donne, ce me semble, qu’une imparfaite solution à ce grand problème. D’où vient, se demande-t-on, que le Peau-rouge se plie si difficilement aux mœurs et aux habitudes de la race européenne ? D’où vient encore que la race européenne refuse si obstinément de sympathiser avec le Peau-rouge, et que, malgré sa philanthropie ou son amour des hommes, elle semble plutôt disposée à anéantir qu’à civiliser ces malheureux enfants, issus du même Père ? D’où vient cette barrière insurmontable élevée entre les deux races ? D’où vient que le plus fort poursuit avec tant d’animosité le plus faible, et ne lui donne point de relâché qu’il ne l’ait entièrement terrassé ? C’est un secret qu’il n’appartient qu’au souverain Juge d’expliquer.

« Souvent, quand je pense au sort de tant de nations sauvages, qui possédaient autrefois d’immenses contrées et qui sont aujourd’hui dans le danger imminent d’en être totalement dépossédées, je me rappelle les premiers habitants de la Palestine, qui, maîtres aussi d’un des plus beaux pays du monde, s’en sont vu dépouiller par un sévère mais trop juste décret de Dieu, dont ils avaient méprisé les menaces et méconnu la bonté.