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eût été troublé dans la cabane solitaire du Français intrépide, comme fut appelé le grand-père maternel de Watomika. Il n’avait d’autres voisins que des sauvages nomades qui, dans certaines saisons de l’année, le visitaient, lui témoignaient beaucoup d’amitié, et lui apportaient leurs pelleteries et des provisions, recevant en échange les objets qui pouvaient le plus leur convenir et leur plaire. Cette petite famille vivait tranquille et heureuse dans le désert, à l’abri des commotions politiques, et des orages sociaux qui vers la fin du siècle dernier semaient l’épouvante, le désordre et la ruine dans la belle France. Mais, hélas  ! les rêves de bonne fortune sont bien trompeurs et toujours bien courts  ! Les visions de félicité ici-bas sont illusoires, incertaines  ; elles passent pour la plupart avec la vitesse de l’éclair, et ne peuvent que nous éblouir un instant  ! L’intrépide Français comptait sur une longue suite de jours heureux. Huit années s’étaient déjà écoulées que la paix et le bonheur n’avaient cessé de régner dans son petit ménage. Les sauvages du pays paraissaient lui être sincèrement attachés  ; il était leur ami, leur bienfaiteur  ; il se croyait assuré contre n’importe quel danger de leur part.

Soudain, un événement imprévu vint anéantir ses plus belles espérances. Un parti de chasseurs comanches avait été massacré par des Espagnols sur les bords du Rio-Grande[1]. Aussitôt le cri

  1. Rio-Grande ou Hondo, rivière du Mexique (Yucatan), a