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j’aie parcourue dans mes voyages au travers du désert. L’action des pluies, des neiges et des vents sur ce sol argileux est à peine croyable, et l’influence combinée de ces éléments en fait un théâtre aux scènes les plus variées. Aperçues de loin, ces terres se présentent à la vue comme de grands villages, comme de vieux châteaux, mais sous des apparences si extraordinaires, et avec une architecture si capricieuse, qu’on les supposerait appartenir soit à un monde tout nouveau, soit à des âges très-reculés. Ici c’est une tour gothique qui s’élève majestueusement, environnée de tourelles  ; d’énormes colonnes semblent y être placées pour soutenir le dôme du firmament. Plus loin, c’est un fort battu par la tempête, entouré de murs dentelés. Ses vieux parapets paraissent avoir soutenu pendant des siècles les assauts successifs des neiges, des pluies, des secousses souterraines et de la foudre. On y voit des coupoles aux proportions colossales, et des pyramides qui rappellent les travaux gigantesques de l’ancienne Égypte. Les agents atmosphériques les travaillent et les attaquent de telle sorte, que probablement deux années de suite ne passent pas sur les cimes de ces étranges constructions, sans les refondre ou les détruire. Cette terre, qui se durcit facilement au soleil, est ou grisâtre, ou d’un blanc éclatant  ; elle s’amollit et se mêle facilement avec l’eau. La Mankizita-Watpa est le grand égout de ce désert, et répond admirablement au nom que les sauvages lui ont donné.