et sur leurs casques s’agitaient les plumes d’aigle. On me promena en grande cérémonie d’une loge à l’autre, pour y participer à tous-les festins ; heureusement j’avais ma bande de mangeurs pour faire honneur aux mets et les avaler pour moi. Un des grands chefs surtout me témoigna une amitié toute spéciale. — « C’est à toi, Robe-Noire, me dit-il, que je dois toute ma gloire dans les victoires que j’ai remportées sur mes ennemis. » — Son langage me surprit, et je lui demandai de vouloir s’expliquer. Aussitôt il ôta du cou son Wah-kon, ou sachet de médecine, enveloppé dans un petit morceau de peau de cabri. Il le déroula à mes yeux, et quel ne fut pas mon étonnement d’y découvrir le restant des allumettes que je lui avais données en 1840 ! — « Je m’en sers, ajouta — t-il, chaque fois que je vais à la guerre. Si le feu mystérieux se montre au premier frottement je fonds sur mes ennemis, car je suis sûr de les vaincre. » — J’eus de la peine à détruire dans son esprit cette singulière superstition. Vous voyez qu’il faut peu de chose parmi les sauvages pour faire sa réputation : avec quelques allumettes, on passe pour un grand homme parmi les Corbeaux, et l’on reçoit les premiers honneurs.
Les Corbeaux ont été molestés par leurs ennemis, pendant plusieurs années : au nord, par les Pieds-Noirs ; à l’est, par les Assiniboins et les Creeks ; au sud, par les Sioux. Chacune de ces nations étant plus nombreuse que celle des Corbeaux,