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ment compris par un Indien intelligent que les paroles écrites le sont pour nous  ; ils contiennent très-souvent l’histoire de quelque grand événement. Ce n’est pas toutefois que les mots manquent dans leurs langues, qui sont très-expressives.

J’ai assisté à toutes les assemblées du grand Conseil depuis le commencement jusqu’à la fin. Comme je l’ai déjà dit, dix mille Indiens, appartenant à différentes tribus et dont plusieurs avaient toujours été en guerre, se trouvaient réunis sur la même plaine. Pendant les vingt-trois jours que dura la réunion, il n’y eut rien de répréhensible sous le rapport du bon ordre  ; tout y fut paisible et tranquille  ; c’est beaucoup pour des sauvages. Ils semblaient ne composer qu’une seule et même nation. Bienveillants les uns envers les autres, ils passaient des heures entières en visites, en festins et en danses  ; parlaient de leurs guerres et de leurs divisions, jadis interminables, comme de choses oubliées et qu’il fallait à tout jamais «  enterrer,   » selon leur expression. Il n’y eut pas le moindre désordre et jamais le calumet ne passa si joyeusement entre tant de mains différentes. Pour faire connaître toute l’importance du calumet, il faut savoir que quand deux sauvages le fument ensemble, cela équivaut à un pacte confirmé par serment, auquel personne ne pourrait contrevenir sans se déshonorer aux yeux de toute la tribu. Ce fut un spectacle vraiment touchant que de voir le calumet, cet emblème de la paix indienne, élevé vers le ciel