Je l'avoue,
Et soit que votre esprit, ou me blâme, ou me loue ;
Qu'il approuve ou condamne un étrange ce discours ; [105]
Je l'aimais, je l'adore, et le ferai toujours.
Mais de quelques ardeurs que j'eusse l'âme atteinte,
Le respect imposa le silence à ma plainte ;
Je brûlais sans parler, dans mes feux innocents ;
Et je perdis mon cœur, mais non pas le bon sens. [110]
Qui lui découvrit donc votre secrète flamme ?
Ha ! Ce furent mes yeux qui trahirent mon âme :
Les sentiments du cœur s'y peignirent trop bien ;
La princesse les vit, et je n'en savais rien.
Ô le divin objet qui s'offre à ma mémoire ! [115]
Ce téméraire cœur se vit comblé de gloire ;
Il découvrit les pleurs dont j'avais l’œil noyé ;
Mais quoi, cet Ixion ne fut pas foudroyé :
Car plus heureux que sage, en sa haute aventure,
Cet objet adoré de toute la nature, [120]
Cette princesse illustre en ses rares vertus,
Fit voir quelque pitié des coups qu'il avait eus,
Et par certains regards obligeants, mais modestes,
J'appris qu'elle souffrait ses flammes manifestes,