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Il occupe l’entrée, et deffend le rocher,
D’où les plus resolus n’oseroient aprocher.
Le heros cependant s’enfonce dans la grotte :
Il la voit spacieuse, et superbement haute :
L’art comme la nature en a fait la beauté,
Et ce prince est surpris de cette nouveauté.
Sa voûte mosaïque, et de lapis formée,
De mille estoiles d’or en tous lieux est semée :
Et ses murs marquetez de nacre et de coral,
Meslent la cornaline, et le jaspe au cristal
Alaric estonné de sa magnificence,
Toujours plus curieux, la regarde et s’avance :
Et comme il cherche à voir les beaur-tez de ces lieux,
La Sibylle elle mesme aparoist à ses yeux
D’une mante à la grecque à l’espaule attachée
La beauté de sa taille est à demy cachée :
Et ses cheveux espars tombent à flots d’argent,
Negligemment serrez d’un bandeau negligent.
Les rides qu’on luy voit, marquent bien son grand âge,
Mais la majesté regne encor sur son visage :
On voit qu’elle fut belle ; et ses traits effacez,
Conservent quelque esclat de leurs attraits passez.
Le roy, sans s’estonner, la regarde ; l’admire ;
Se souvient qu’un hermite a sceu la luy predire ;
Et la chaste Sybille aprochant du heros,
Fait retentir la grote, et luy tient ces propos.
Prince l’honneur du Nord, et sa plus grande gloire,
Ta couronne s’aproche ainsi que ta victoire :