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Du Païs de Liége.

Ville & du Peuple, & de les maintenir envers & contre toutes ſortes de perſonnes ſans exception.[1]

Ces nouveaux Oficiers, production monstrueuſe de la révolte, du tumulte & de la fureur, ne démentirent point leur origine. Pour ſe mettre en état de mériter la confiance dont le Peuple les avoit honoré, ils commencérent par ſe former un Corps de milice, dont ils ſe déclarérent les Chefs.

On les vit bientôt trancher du Souverain, regarder pendant quelque tems leur Prince comme leur égal, & peu après comme leur inferieur, lui ſoutenir en face, que les forces de l’État n’étoient point celles du Prince, mais celles du Peuple, & ſur ce prétexte les lui refuſer pour ſecourir ſes Aliés.[2]

[3]La cauſe des Princes, lorſqu’elle est juſte, trouve toûjours des Défenſeurs. Henri de Gueldres fut ſecouru dans un beſoin ſi preſſant par des Puiſſances voiſines. Le Peuple, malgré ſes forces ordinaires & les auxiliaires, qu’il avoit ſû ſe procurer, fut mis à la raiſon. Les Chefs de la rébellion furent proſcrits. Le nouvel Ofice, dont l’établiſſement avoit ocasioné tant de maux, fut ſuprimé ; l’autorité legitime reprit le deſſus ; la tranquilité publique fut rétablie ; mais elle ne dura qu’autant que le Prince, qui l’avoit procurée, & ceux qui lui ſuccédérent, ſurent la maintenir.

Le plaiſir que le peuple ſe promettoit en ſe créant des Chefs, ſous la conduite deſquels il croïoit avoir vécu

  1. En 1253, ſous Henri de Gueldres. V. Hocſem en ſa vie, chap. 5. Fiſen, Foullon & Boüille, en l’art. des Mœurs, ci-après.
  2. Henricus [Henri de Dinant, premier Bourguemeſtre] Ductor Populi contradicit, non enim, ait, pro cauſis extraneis, ſed pro Patria, pro Juribus Electi & Eccleſiœ, bellare tenemur. Ce ſont les termes d’Hocſem, à l’endroit cité. V. les trois autres Auteurs indiqués en la Note [c]
  3. Henri de Gueldres, étant ſecouru par le Duc de Brabant, les Comtes de Gueldres, de Juliers, & de Lozi, força ſes Sujets à accepter la Paix à des conditions trés-dures ; il fit condamner Henri de Dinant à un baniſſement perpétuel ; fit prendre un autre Bourguemeſtre, & cet Ofice fut ſuprimé depuis l’an 1255 juſques à l’an 1297, c’eſt-à-dire, ſous le reſte du regne de Henri de Gueldres qui dura juſques à 1274, ſous celui de Jean d’Enghien, de Jean de Flandres, & une partie de celui de Jean de Châlons. V. les Auteurs cités aux précédentes Notes ; la Cronologie qui est à la fin de la ſeconde Partie de l’Histoire de Fiſen ; & le Catalogue des Bourguemeſtres, qui eſt à la fin du ſecond Tome de celle Foullon.