Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, Curet, 1810.djvu/315

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rien de plus. S’il n’y a ni imprudence, ni apparence, et que l’on n’y voie rien, sinon quelque prétexte de médisance qu’un esprit malicieux a pu en tirer, ou je n’en dirai rien du tout, ou je dirai cela même. La sainte Écriture compare souvent la langue à un rasoir, et avec raison ; car je dois être sur mes gardes quand je juge mon prochain, comme l’est un habile Chirurgien qui fait une incision entre les nerfs et les tendons.

Enfin, quand on blâme le vice, il faut épargner la personne le plus qu’on peut. Il est vrai que l’on peut parler librement des pécheurs reconnus publiquement pour tels et diffamés ; mais ce doit être avec esprit de charité et de compassion, et non pas avec arrogance ou présomption, ni par aucune joie que l’on en ait, car ce dernier sentiment n’est le propre que d’un cœur bas et lâche. Entre tous ceux-là, j’excepte les ennemis déclarés de Dieu et de son Église, puisqu’il faut les décrier, autant que l’on peut, comme les chefs des Hérétiques et des Schismatiques, et de tous les partis : c’est une charité que de crier au loup, quand il est entre les brebis, quelque part qu’il soit.

Chacun se donne la liberté de censurer les Princes, et de médire des Nations entières, selon la diversité des inclinations dont on est prévenu : Philothée, ne faites pas cette faute, parce qu’outre l’offense