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attire tant qu’il peut la flèche à soi, mais ce n’est que pour la décocher avec plus de force ; il semble aussi que ces médisans retirent du discours une médisance qu’ils ont commencé d’avancer ; mais ce n’est que pour en retarder le trait avec plus de malice, et pour le faire pénétrer plus avant dans les cœurs.

Après tout, la médisance qui est assaisonnée d’une fine raillerie, est la plus cruelle de toutes ; et l’on en peut comparer la malignité avec celle de la ciguë, qui de soi n’était qu’un poison lent, et contre lequel on a beaucoup de préservatifs, devient irrémédiable, si elle est mêlée avec le vin. Car c’est ainsi qu’une médisance qui ne feroit qu’entrer par une oreille et sortir par l’autre, fait une violente impression sur l’esprit, quand on sait lui donner un tour subtil et plaisant. C’est ce que David veut nous faire entendre par ces paroles : Ils ont le venin d’aspic sous les lèvres. En effet, la piqûre de l’aspic est presque imperceptible, et elle excite seulement une démangeaison agréable, qui dilate le cœur et les entrailles, et y fait glisser le venin si intimement que l’on ne peut plus y remédier,

Ne dites pas un tel est un ivrogne ou un voleur, pour l’avoir vu une fois s’enivrer ou faire un larcin ; ce seroit une imposture, puisqu’un seul acte ne peut donner le nom à aucune chose. Le soleil s’arrêta